Cette phrase n’est pas celle d’un philosophe âgé mais celle d’Alice de Broqueville, une jeune actrice de cinéma qui incarne la passion et rayonne sur les planches ...
Alice a depuis toujours la passion du cinéma chevillée au corps. Dès son plus jeune âge, elle était passionnée par les « making off » des films pour comprendre le jeu d’acteur, les coulisses, le dessous des cartes. Le premier film qui l’a marquée était “Les Mots bleus” d’Alain Corneau. Elle passait des heures à regarder des films avec des acteurs enfants rêvant d’être à leur place.
A 15 ans, à la question traditionnelle : "quelles études vas-tu faire plus tard" ? je préférais répondre architecte pour éviter les réactions qui n’auraient pas manqué si j’avais répondu actrice. Je m’inscrivais seule à des auditions pour des films. Ma mère m’amenait au cours de danse dès 7 ans, à des castings à 12, 13 ans et évidemment à différents cours de théâtre. Je suivais ces cours alors que ce n’était pas le théâtre qui m’attirait à ce moment-là, mais bien le cinéma. Cela a évolué depuis et je serais ravie de jouer dans une bonne pièce. J’ai fait le casting de Girl avec Lucas Dhont lorsque j’étais en rétho. Ce casting a fonctionné et je me suis mise à rêver ... Pourquoi pas moi ? Mais la réalisation complète d’un film, de l’écriture du scénario à la sortie du film, prend 4 ans. Entre le casting de Girl un été, les répétitions pendant l’année et le tournage l’été suivant, j’ai eu la chance d’entrer au cours Florent. C’est une magnifique école quoique très exigeante.
Tout s’est bien enclenché pour moi. Après Girl, j’ai eu la chance de tourner un premier rôle, cette fois, dans un court métrage, Gye. Comme pour Girl, il s’agit d’un film bilingue, français-néerlandais qui a été présenté à des festivals. De ces rencontres, castings et autres contacts découleront de nouvelles opportunités de tournage.
J’ai ensuite été acceptée à une prépa-concours à Paris où j’ai poursuivi ma formation avant que la crise du Corona ne nous arrête et en octobre dernier et j’ai signé avec une agence à Paris. Pour moi, c’est une étape importante car cela me donne le sentiment d’être légitime. (ndlr : le métier d’agent pour les mineurs est interdit en Belgique car cela s’apparente à du proxénétisme…)
Toutes ces étapes, castings, tournage dans des films présentés à des festivals, m’ouvrent des portes et je vais encore tourner un premier rôle dans un court métrage flamand cet été. Le thème porte sur la relation entre une fille et ses parents. »
Revenons à ton parcours : « J’ai fait mes études en néerlandais au Lycée Mater Dei jusqu’à ma troisième secondaire puis je suis passée à l’Institut de la Vierge Fidèle. »
Comment un profil comme le tien s’inscrit-il dans un cadre comme la Vierge Fidèle ?
« J’ai la GNAC1, j’ai toujours su ce que je voulais faire et être, c’est plus fort que moi et je pense que c’est la meilleure recette pour évoluer dans un milieu quel qu’il soit. En plus, mes parents m’ont toujours suivi, ils sont super cool. Ils m’ont seulement demandé de prévoir un plan B. Mais, un plan B, c’est comme quand vous étudiez la médecine, à partir de quand faut-il l’activer ? à partir de quand peut-on dire que cela fonctionne ? C’est la question…. »
Quels sont tes acteurs, actrices fétiches ?
J’admire Isabelle Adjani, Matthias Schoenaerts, Isabelle Hupert, Emmanuelle Bercot, Charlotte Gainsbourg, Maïwenn, Adèle Exarchopoulos, actrice de La Vie d’Adèle, qui a défini le sens de ce qu’elle voulait faire, ce film est une claque.
Et des mentors ?
Gurshad Shaheman, dramaturge, comédien, professeur, toujours à l’écoute …et chaque professeur du cours Florent, en fait.
Mais, je n’ai pas de référent, on apprend à ne pas en avoir. C’est chacun pour sa tronche. Pour garder sa place au cours Florent, il faut montrer qu’on est là, qu’on est motivé, qu’on a envie, qu’on est en forme, même si on ne l’est pas. Le métier d’actrice est un travail de longue haleine, il faut toujours être disponible, montrer qu’on existe, et surtout donner envie aux gens de travailler avec nous. On dépend constamment du désir des autres. C’est comme tomber amoureux. C’est la raison pour laquelle il faut faire des castings. C’est évidemment plus facile si on est né dans ce monde, même s’il est clair qu’on ne peut réussir sans travail et talent.
Pour quelqu’un qui se dit peu sociable, ce doit être un défi ?
Oui, évidemment, mais la passion décuple les forces. J’ai la chance d’être en Belgique et d’avoir construit un réseau tant du côté francophone que néerlandophone, qui sont des mondes plus petits où il est plus facile de se faire repérer qu’à Paris.
L’impact du COVID ?
J’ai plus de casting depuis qu’on voit le bout du tunnel mais jusque-là, il fallait faire des castings sur video-tape, sans le coaching d’un directeur de casting. C’était un défi de plus. J’attends avec impatience la réouverture des cinémas le 9 juin. C’est le moment fort pour moi !
D’autres hobbys ?
Ma famille, mes amis et le cinéma…(rires).
Ton appartenance à la noblesse ? un atout, une charge, un non sujet ?
Hors sujet. Le cours Florent, où j’ai appris plus en un an qu’en six années d’humanités, m’a appris l’ouverture sur le monde et les gens, la liberté inconditionnelle, le champ des possibles. C’est difficile de faire cohabiter cette vision du monde avec un système, une institution régie par des codes ...
Un message pour nos membres ?
« Cultivons-nous, regardons ce qui se passe autour de nous, bousculons-nous, confrontons-nous ne restons pas dans notre confort. Allons voir des films qui nous dérangent, laissons nos principes et nos préjugés de côté s’ils vont à l’encontre de la liberté individuelle de chacun. Ecoutons-nous les uns les autres et soyons égoïstes, Arrêtons de vivre en fonction de… »
Merci Alice pour ta passion et ton invitation à ne pas accepter les choses établies. Le plaisir de ces interviews, c’est de montrer que la noblesse est diverse et compte nombre de membres libres.
1 Esprit de compétition, désir de gagner, ou d’affronter résolument les difficultés. Combativité.
Interview réalisée par Catherine de Dorlodot